À la rencontre du réseau LCDD #17 : Pauline David de l'association LPC Cinéma documentaire

L’association LPC est une structure de programmation de films. Pôle ressource spécialement dédié au documentaire, elle œuvre au développement des publics du cinéma du réel via différentes activités mises en place tout au long de l’année. En janvier, LPC organise le festival de cinéma En ville !, pour cette occasion, nous avons posé quelques questions à la directrice et programmatrice Pauline David.

Pourriez-vous résumer quelle est la vocation de l'association LPC ?

LPC Cinéma documentaire est une structure de programmation de films documentaires. L’idée est de programmer tout au long de l’année dans des cinémas partenaires, des films du réel mais aussi d’organiser tout un tas d’activités autour de ces films pour amener des nouveaux publics vers le cinéma documentaire, on fait vraiment un gros travail de développement des publics. Il s'agit donc d'une structure volante, nous n’avons pas de salle, mais travaillons depuis le début avec plusieurs partenaires avec qui nous montons les projets.

Comment vous organisez-vous tout au long de l’année pour déployer vos activités ?

On a des partenaires historiques avec qui on a vraiment développé des relations de confiance. Moi je suis programmatrice depuis 15 ans donc je travaille avec différents cinémas et puis au fur et à mesure des années, des cinémas se sont rajoutés comme le Cinéma Palace au centre de Bruxelles ou en fonction des films, je vais aussi chercher des cinémas partenaires qui sont plus adaptés en terme de jauge ou de situation géographique. La base de nos partenariats sont les cinémas donc et puis on a également une programmation hors des salles, dans des associations locales, des maisons de la culture ou encore un service senior de Bruxelles.

Quel public vient voir les films programmés par LPC ?

Notre public est très divers. C’est à peu près ⅓ de public cinéphile, c’est-à-dire des gens qui nous suivent depuis longtemps, abonnés à notre newsletter et qui connaissent notre structure et les films qu’on programme. Il y a aussi ⅓ de public étudiant car on travaille beaucoup avec des écoles de cinéma et d’art et en fonction des films on va ouvrir à des anthropologues, géographes donc on est vraiment en lien avec le réseau universitaire. Et puis ⅓ de public qu’on vient chercher sur le contenu du film avec l’idée qu’ils découvrent un bon film documentaire au cinéma.

LPC propose également un programme d’aide à l’écriture Regards sur les Docs, pouvez-vous nous en dire plus ?

C’est un programme professionnel que j’ai créé en 2018, ouvert aux jeunes auteurs et autrices, qui ont réalisé 1 à 3 films à peu près, pas jeune en âge. C’est une formation professionnelle qui se passe en plusieurs étapes. Il y a d’abord une sélection de 5 participant(e)s qui sont accompagné(e)s par un coach en écriture au mois de septembre et ces personnes présentent publiquement à des professionnels belges et quelques internationaux leur projet. La présentation dure 20 min et l’idée est de se dire que les professionnels présents dans la salle vont rencontrer à d’autres occasions ces films-là parce qu'ils sont dans la commission du film ou parce que c’est la chargée de programme de chez Arte par exemple, etc... Ainsi les participants auront déjà développés une relation de confiance avec les professionnels. 

Le festival En ville ! va bientôt avoir lieu, quelle est sa spécificité ? Quels sont les objectifs de ce festival ?

Le festival En ville ! est une des activités de la structure que j’ai créée en 2019. Au départ il n’était pas compétitif et finalement les auteurs/autrices invité(e)s me disaient qu’il serait bien d’avoir des prix car c’est important pour les cinéastes. Depuis 2020, il s'agit donc d'un festival compétitif. L’idée est de célébrer le réel à un moment de l’année. On met en avant des cinéastes “ouverts à l’inattendu de la rencontre” et le festival En ville !  est au cœur de la ville, aussi divers qu’une ville puisse être dans sa diversité. La programmation explore la notion très vaste du territoire dans lesquels s’inscrivent les auteurs et autrices mais également des territoires imaginaires, certains films vont parler de questionnements plus personnels et intimes. On propose trois sections de compétition plutôt long métrage, court ou moyen métrage et enfin depuis cette année, une compétition film d’étudiant(e)s. Les films programmés sont belges et internationaux.

Vous programmez des films du réel belges et internationaux, comment élaborez-vous cette programmation ?

Le festival En ville ! est un événement dont la programmation est pensée dans son ensemble, la ligne éditoriale est très forte. Je suis entourée de visionneurs, de pré-sélectionneurs, de "regards amis" qui vont pouvoir me faire remonter des films. Il s’agit d’un festival attentif à la résonance des films les uns avec les autres, c’est vraiment une ligne forte : l'important c’est que les films se parlent entre eux. Notre objectif c’est que le festivalier puisse enrichir son regard d’éléments et de réflexions sur le cinéma. En ville ! pense avant tout à ses spectateurs plutôt qu’à l’esprit compétitif. La notion de partage entre les cinéastes, leurs films et les spectateurs est primordiale. 

Pouvez-vous partager une anecdote marquante qui reflète l’esprit du festival ?

Le parrain du festival est Frederick Wiseman, je lui avais proposé d'être le parrain car je l’avais déjà invité plusieurs fois à Bruxelles pour montrer ses films et En ville ! est un festival dont l’esprit est vraiment hérité des films de Wiseman dans la question de la rencontre. La première fois que je l’ai fait venir au festival En ville ! il y avait une grosse tempête de vent entre la France et la Belgique, tous les trains étaient bloqués. Frederick Wiseman ne pouvait pas venir directement jusqu’à Bruxelles donc il m’a appelé depuis la gare du nord pour me dire qu’un train partait à Lille mais c’est à 130 km de Bruxelles. Donc je lui ai dit de prendre le train et que j’allais le chercher à Lille en voiture pour l’amener à Bruxelles. Heureusement, Frederick Wiseman réalise de très longs films donc on a lancé le film La Danse, le ballet de l'Opéra de Paris et je suis partie le chercher à Lille et j’ai fait l’aller/retour. J’ai roulé à 150 km/h dans la tempête. Frederick Wiseman s’est accroché à son siège, il m’a dit qu’il avait eu peur mais que je conduisais bien. C’est vraiment l’esprit du festival car on veut tout faire pour que le public rencontre les réalisateurs, on est prêts à tout. 

Pourquoi avoir rejoint le réseau de la Cinémathèque du documentaire et depuis quand LPC en fait partie ?

C’est vraiment formidable de pouvoir échanger avec des structures de programmation. LPC est une structure volante de programmation du cinéma documentaire et en Belgique on est les seuls à faire ce travail alors qu’en France il y a pleins de structures partout sur le territoire. C’est extrêmement précieux de pouvoir discuter à propos de problématiques communes, d’expériences ou juste d’échanger des idées. Je me rends compte que les problématiques ne sont pas toujours les mêmes entre la Belgique et la France et donc je pense qu’on peut s’apporter mutuellement encore plus des éléments nouveaux dans nos façons de faire. Par exemple, la structure que je dirige est toute petite donc on a beaucoup travaillé sur la débrouille.

Collaborez-vous avec certains membres du réseau ?

Oui on collabore avec plusieurs structures, par exemple j’ai élaboré une programmation sur le cinéma belge à Lussas avec Ardèche images, l’an dernier. J’ai été invitée également à la Bpi pour faire un focus cinéma belge. On échange également beaucoup de manière informelle les uns avec les autres. 

 

Entretien réalisé par Sabrina Jacomelli en service civique à la Cinémathèque du documentaire.

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